Feu Mathias Pascal
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Luigi Pirandello est un écrivain italien, poète, nouvelliste, romancier et dramaturge, né le 28 juin 1867 à Agrigente en Sicile, durant une épidémie de choléra, et mort à Rome le 10 décembre 1936. Son œuvre a été récompensée du Prix Nobel de littérature en 1934. En 1903 l'éboulement de la soufrière provoque la faillite de l'entreprise paternelle de Pirandello et indirectement la folie de sa femme. Pirandello envisage de se suicider, mais il reprend courage en s'adonnant à son travail de créateur : en imaginant la disparition de Mathias Pascal, il révèle son secret désir de mort et en même temps surmonte sa tentation de suicide.Mathias Pascal habite un village imaginaire de Ligurie appelé Miragno ; son père a laissé comme héritage à sa famille une importante fortune, mais gérée avec avidité par un administrateur peu scrupuleux. Garçon timoré, il abandonne le foyer conjugal après une querelle avec sa femme et sa belle-mère et se rend à Montecarlo. Là, il gagne au jeu plusieurs dizaines de milliers de lires. En lisant les faits divers, il apprend qu'on le croit mort, suite à la fausse identification du cadavre d'un désespéré, qui s'est jeté dans le puits de Mathias. Cette étrange situation lui suggère de faire croire à sa mort véritable et de tenter de commencer une vie nouvelle. Feu Mathias Pascal prend alors le nom d'Adrien Meis. Extrait : Mais je dois confesser que la vue de mon nom imprimé là, sous cette raie noire, loin de me réjouir, m'accéléra tellement les battements du cœur qu'après quelques lignes je fus obligé d'interrompre la lecture. L'« effroyable consternation et l'inénarrable angoisse » de ma famille ne me firent pas rire, ni l'amour et l'estime de mes concitoyens, ni mon zèle pour mon emploi. Le souvenir de cette triste nuit à l'Épinette, après la mort de ma mère et de ma petite, qui avait été comme la preuve la plus forte de mon suicide, me surprit d'abord, comme une participation imprévue du hasard, puis me causa du remords et de la honte. Eh ! non ! je ne m'étais pas tué pour la mort de ma mère et de ma petite fille, bien que, peut-être, cette nuit-là, j'en eusse eu l'idée ! Je m'étais enfui, c'est vrai, en désespéré ; mais voilà que maintenant je revenais d'une maison de jeu, où la Fortune m'avait souri et continuait à me sourire de la manière la plus étrange. Un autre s'était tué à ma place, un étranger certainement, à qui je volais les pleurs de ses parents lointains et de ses amis, à qui j'imposais l'éloge funèbre du pommadé chevalier Pomino !